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27/09/2024

Les coffres-forts du made in Italy

Des premières malles construites à la demande de musiciens aux luxueuses pièces de design, LaErre vise aujourd’hui le monde industriel : « Nous brevetons actuellement un produit destiné à la Tech », déclare son PDG

par Francesca Lai

Qu’elle soit dotée d’un couvercle bombé ou plat, une malle incarne toutes sortes de possibilités, de voyages et d’aventures. Elle symbolise la richesse, telle celle trouvée dans les coffres-forts de L’Île au trésor de Robert Louis Stevenson. De même, elle peut personnifier la royauté, à l’instar du plus ancien coffre-fort découvert, qui aurait dû accompagner le pharaon Toutankhamon dans son voyage vers l’au-delà. Chez Hans Christian Andersen, la malle devient un coffre volant. Pour Riccardo Redaelli, PDG et fondateur de LaErre, les malles suscitent admiration et curiosité, nous poussant sans cesse à explorer.

PARMI LES CRÉATIONS DU FONDATEUR RICCARDO REDAELLI , IL Y A LA MALLE/CAVE A VIN, ACHETÉE PAR CARLO CRACCO, CHEF MICHELIN
immagine wine classic wine cabinet


Chaque flight case devient ainsi une nouvelle opportunité commerciale. L’histoire de LaErre débute avant même que Riccardo Redaelli ne devienne chef d’entreprise. « J’ai été batteur, raconte le PDG, et en tant que musicien au sein d’un groupe revival, je faisais pratiquement 20 concerts par mois, je vivais principalement la nuit ».

Alors, Riccardo Redaelli commence à réfléchir sur la manière d’optimiser les opérations de chargement et de déchargement des instruments, tout en veillant à leur protection durant le transport. « C’est dans un petit atelier que j’ai réalisé mon premier coffre pour faciliter le déplacement de ma batterie et la conserver de la meilleure façon possible. » Les demandes des collègues arrivent et confortent Redaelli dans l’idée qu’une opportunité s’offre à lui. Il décide alors de s’engager pleinement dans cette voie. «  J’aspirais alors à une vie différente. En 1999, j’ai donc lancé mon activité dans un entrepôt de 100 mètres carrés que je louais à Merate. Personne ne croyait au succès possible de mon entreprise. Il y a vingt-cinq ans, personne ne misait sur un tel business, mais cela ne m’a pas empêché d’avancer : j’avais un client et le soutien de mon père. »  Et il ajoute : « Pour pouvoir acheter les machines de production, j’ai dû vendre ma voiture. » En 2000, le petit atelier se transforme en une véritable entreprise.

Parmi les défis initiaux, Redaelli mentionne la quête de fournisseurs. Cette étape s’est révélée cruciale pour trouver des artisans talentueux capables de conférer à la malle cette touche unique et hautement personnalisée que Redaelli souhaite insuffler à chaque création. Envisager le produit comme une pièce unique et entièrement adaptable s’est avéré être un choix judicieux, le lapis philosophorum représentant l’essence même de la vie pour LaErre. « J’ai identifié dans l’annuaire quelques concurrents potentiels, puis je suis allé découvrir leur histoire pour en écrire une autre. » Le travail de benchmarking est enrichi par une analyse continue. « Ce dont j’ai besoin pour innover LaErre ne se trouve pas dans les livres, mais dans les ateliers des artisans, où je découvre les matériaux les plus exceptionnels, du cuir le plus souple au cachemire le plus doux, en passant par le bois le plus robuste. » Une démarche minutieuse et de longue haleine pour concevoir une malle non seulement facilement transportable, mais également d’une élégance incomparable. « L’objectif est de transformer une malle, simple objet utilisé pour le transport, en un produit fonctionnel à fort impact esthétique, caractérisé par un style reconnu et reconnaissable. » Malgré les difficultés rencontrées à ses débuts, l’avenir sourit à LaErre. Aujourd’hui, l’entreprise, qui compte vingt collaborateurs, est située à Ronco Briantino, au cœur de la Brianza en Lombardie. Grâce à son excellente maîtrise du design et de l’artisanat, elle excelle dans la création de flight cases, conçus spécifiquement pour transporter du matériel musical lors de spectacles. Cependant, son savoir-faire ne se limite pas à ce domaine. L’entreprise a su diversifier ses activités pour s’ouvrir au monde du mobilier, de la restauration, du vin, du café, de la vente au détail, des courses et de l’équitation. Reconnue à l’échelle nationale et internationale, LaErre produit chaque année entre 2 800 et 3 000 malles destinées au show-business, à l’horeca et au sport automobile, générant ainsi un chiffre d’affaires de 2 961 606 euros (données 2022).

La pandémie de Covid-19 a marqué un tournant pour LaErre en tant qu’entreprise qui opérait principalement  dans le secteur de l’événementiel live. « Ce moment a été une dure épreuve pour moi, en tant qu’homme et en tant qu’entrepreneur », explique Riccardo Redaelli. « Pour la première fois, je me suis dit que je n’y arriverais pas. Puis la situation a complètement changé quand les clubs, les bars et les restaurants ont commencé à animer les villes avec leurs terrasses. Alors, une idée lumineuse m’est venue. » Une malle sur roulettes, capable de se transformer en café, brasserie ou pub. Il ne s’agit pas de magie, juste d’une remarquable ingéniosité commerciale. L’ouverture à d’autres marchés a déterminé la phase actuelle de la vie de LaErre qui, désormais, avec sa nouvelle marque LaErre Trunks, fait de l’œil à l’ultra-luxe. La malle se métamorphose en une œuvre d’art inédite, pouvant même atteindre une valeur de 75 000 €. « Cigares, vin, diamants. Dans ce cas, la malle devient le coffret des désirs de l’acheteur », commente Redaelli. Pour ce secteur, LaErre produit entre 70 et 100 pièces chaque année, suscitant l’intérêt de célébrités telles que le cuisinier italien, Carlo Cracco, qui fut le tout premier possesseur d’une valise/cave à vin signée LaErre Trunks.

Redaelli est en train d’écrire un nouveau chapitre, se rapprochant toujours plus du monde médical, industriel et technologique. Outre la conception de malles mobiles dédiées aux professionnels de la santé, comme les pharmacies mobiles pour les vétérinaires et des malles pour transporter des dispositifs médicaux, l’entreprise se tourne également vers l’industrie. « Cela n’a pas été facile de convaincre les entreprises que ces malles peuvent considérablement faciliter le travail des équipes, mais nous avons réussi. Aujourd’hui, avec l’appui de deux ingénieurs, nous sommes en train de breveter un article destiné au secteur de la Tech. »

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